Le projet «éclosions urbaines» est un festival-atelier d’art contemporain qui contribue à préserver et valoriser le patrimoine urbain matériel et immatériel de Porto-Novo et à faire de cette ville une destination touristique majeure au Bénin et en Afrique de l’Ouest. Le but du projet est d’organiser un événement culturel à rayonnement international à Porto-Novo, pour rénover et valoriser le réseau des places traditionnelles de la ville, en associant étroitement à l’ensemble du processus dès la phase amont les collectivités familiales directement concernées, les habitants, artistes, urbanistes et artisans. La démarche adoptée est participative et s’appuie sur les capacités d’innovation et les savoir-faire locaux.
En proposant d’intervenir sur les places traditionnelles de Porto-Novo, le projet «éclosions urbaines» repositionne la «ville furtive», secrète, au cœur du processus d’évolution de la ville africaine. Dimension non matérielle de la cité le plus souvent ignorée par la planification urbaine, elle est pourtant essentielle pour la connaissance de l’âme de la ville, des parcours porteurs d’identité immatérielle et constitutifs de l’esprit des lieux et de l’imaginaire urbain des habitants. Les places traditionnelles sont des espaces quotidiens de convivialité et de proximité pour tous, mais aussi des lieux où se déroule une fois par an, tous les trois ou tous les cinq ans, la grande cérémonie vodùn appélée Hùnwê, organisée par les collectivités familiales en l’honneur de leurs ancêtres-dieux et de leurs divinités. Les places traditionnelles sont à la fois des marqueurs urbains, la mémoire de la ville et le cœur de ses sociabilités. Bien que menacé, leur réseau demeure une composante majeure de l’essence même de la ville, tant sur le plan de sa structuration urbaine que sur celui de son organisation sociale et de son ancrage historique. Disséminées dans le tissu urbain ancien, elles sont le pollen d’une urbanité africaine aujourd’hui presqu’effacée par le concept triomphant de la «ville moderne» du XXème siècle.
Ce projet propose de les révéler et de les réactiver une à une, générant autant d’éclosions urbaines pour amorcer le renouveau de l’urbanité africaine enfouie au cœur d’une des villes historiques majeures du continent. Projet innovant, il invente un équilibre subtil entre valorisation du patrimoine et ouverture à la modernité, entre dynamisation économique, inclusion sociale et protection de l’environnement. Son impact est direct et immédiat sur les bénéficiaires, car il améliore la vie quotidienne des habitants, leur offre un environnement plus sain et renforce la fonctionnalité et l’attractivité de leur place. Il fait aussi connaître le travail des artistes en investissant l’espace public comme lieu d’expression artistique et d’exposition et fait reconnaître leur place dans la cité comme médiateurs entre cultures traditionnelles et dynamiques de développement, pour favoriser l’épanouissement d’une urbanité africaine contemporaine à Porto-Novo, ancrée dans les valeurs traditionnelles et le patrimoine matériel et immatériel de la ville.
Programme global de réhabilitation d’une quarantaine de places traditionnelles à forte valeur sociale et culturelle à Porto-Novo, le projet est initié et porté par OUADADA-Bénin et la Communauté d’Agglomération de Cergy-Pontoise en France qui entretient des relations de coopération décentralisée avec la ville de Porto-Novo depuis 1995.
Le programme «éclosions urbaines» a déjà réalisé une opération pilote de réhabilitation de deux places, Djissou comè et Djihoué comè, opération soutenue par de nombreux partenaires institutionnels, scientifiques et financiers tels que le Centre Culturel OUADADA, la Communauté d’Agglomération de Cergy-Pontoise en France et son Office de Tourisme, la Mairie de Porto-Novo et son Office de Tourisme, la Métropole de Lyon et l’association des artistes plasticiens de Porto-Novo, dénommée Alokplé.
L’Agence Française de Développement et le Fond Français pour l’Environnement Mondial ont intégré dans le grand projet «Porto-Novo Ville Verte» 2016- 2020 le financement de la réhabilitation de cinq nouvelles places.
De nouveaux partenaires scientifiques ont manifesté leur intérêt pour rejoindre le projet : l’Université d’Abomey-Calavi, l’Université de Cergy-Pontoise, l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, l’Ecole du Patrimoine Africain et l’association Incite Formation de Cergy-Pontoise.
Le projet pourra également requérir le soutien de l’Etat Béninois, via notamment le Ministère de la culture, de l’artisanat et du Tourisme et ses Fonds d’Aide à la Culture, Fonds de Développement du Patrimoine Culturel et Fonds National de Développement et de Promotion Touristiques, des fondations privées telles que Moov, Mtn et Glo, et des mécènes béninois, de la diaspora et étrangers.
Bien que nécessitant des financements limités, le projet «éclosions urbaines» est ambitieux dans ses objectifs de préservation du patrimoine, de développement touristique, de transformation sociale et économique et de création d’un modèle inclusif, car conçu avec et pour les bénéficiaires, les collectivités familiales, usagers des sites, artistes, artisans, touristes, populations de Porto-Novo. Le projet «éclosions urbaines» est potentiellement un formidable bras de levier pour le développement de l’art et du tourisme à Porto-Novo et au Bénin.
Méthodologie
En 2014, les porteurs du projet ont identifié vingt-et-une places traditionnelles dans la ville, sur un total de quarante localisées dans le tissu urbain ancien et répertoriées dans la base de données du SIG (Système d’Information Géographique) relative aux places traditionnelles de Porto-Novo, réalisée en 2001, par Gérard Bassalé, directeur du Centre Culturel OUADADA, dans le cadre de ses travaux de recherches au Département d’Histoire et d’Archéologie à l’Université d’Abomey-Calavi. Les vingt et une places ont fait l’objet de relevés par un géomètre.
Le projet «éclosions urbaines» peut être réalisé en opérations successives, étape par étape, correspondant à la réhabilitation d’une ou de plusieurs places en fonction des financements disponibles. L’expérience pilote d’aménagement des deux premières places a démontré que la durée globale du processus de réhabilitation d’une place peut être estimée à 12 mois.
Pour chaque étape, un Comité de pilotage – composé d’institutionnels, représentants de l’Etat et des Collectivités Territoriales, de scientifiques et d’acteurs béninois et étrangers intervenant dans les domaines de l’art, du patrimoine, du tourisme, de l’histoire, de l’urbanisme et de la culture – sélectionne un ou plusieurs sites parmi ceux identifiés ou non, en fonction des moyens techniques et financiers mobilisables, de la cohérence d’ensemble et des priorités du projet de développement touristique de la ville.
La Direction opérationnelle du projet regroupant le Centre Culturelle OUADADA de Porto-Novo et la Communauté d’Agglomération de Cergy-Pontoise est dirigée par M. Gérard Bassalé. Elle rencontre les collectivités familiales et les usagers de la place sélectionnée pour leur présenter le projet et échanger. Les collectivités, communautés et habitants du quartier doivent émettre un avis favorable préalablement à toute poursuite du processus, puis confirmer leur participation aux travaux et faire des propositions d’aménagement de leur place.
La Direction opérationnelle mène des études de faisabilité, réalise des relevés géomètres détaillés, levés topographiques, plans, cartes,… du site concerné, lorsqu’ils n’ont pas été déjà effectués. Elle évalue aussi les coûts des travaux puis réalise un dossier de projet scientifique, artistique et technique, complété par un quantitatif et un budget détaillés. Dans l’hypothèse où le plan de financement de l’opération n’est pas préalablement bouclé, ce dossier, de présentation très qualitative, sert de support à une demande de subvention auprès des bailleurs de fonds nationaux et internationaux. Avant présentation aux bailleurs potentiels, le dossier est validé par le Comité de pilotage qui conduit les démarches de recherche de soutiens matériels et financiers auprès des institutions nationales et internationales, des fondations, des entreprises publiques et privées, des mécènes et autres.
Parallèlement au déroulement du processus de réhabilitation conduit par la Direction opérationnelle, un Comité scientifique regroupant les partenaires universitaires et scientifiques engage un état des lieux et documente l’histoire, l’organisation et la fonction de la place ou des places concernées. Il fait l’inventaire des patrimoines matériels et immatériels, puis actualise la base de données du SIG. Il crée et enrichit un corpus scientifique sur les places traditionnelles, par les moyens de publications, conférences et communications. Des ateliers-écoles seront également organisés avec des élèves et des étudiants en art, histoire, anthropologie, archéologie, géographie, etc., des universités d’Abomey-Calavi, de Cergy-Pontoise et de Paris 1 Panthéon-Sorbonne pour participer aux travaux et aux recherches.
Après concertation avec les collectivités familiales et les usagers, la Direction opérationnelle lance un appel à projets de création artistique à l’attention des artistes, designers, architectes, etc. pour sélectionner des concepteurs. L’appel est diffusé sur les réseaux sociaux et dans les médias durant un mois. Elle sélectionne ensuite des concepteurs parmi les candidats qui ont répondu à l’appel, pour participer aux travaux. Ils travaillent ensemble un mois en atelier pour concevoir et produire des documents de conception des aménagements tels que des plans, des croquis, des dessins et des œuvres qui seront réalisées, après concertation et validation par les collectivités et les usagers de la place. Ils étudient aussi les matériaux à utiliser pour que les œuvres qui seront réalisées sur le site résistent aux intempéries, respectent l’environnement et les usages du lieu et s’intègrent dans le tissu urbain traditionnel. Des matériaux locaux tels que la terre, l’argile, la roche, le bois, etc. sont privilégiés.
Ils travaillent durant un mois pour réaliser l’ensemble des travaux. Les interventions se traduisent concrètement par le nettoyage et l’assainissement du site, la protection des arbres sacrés contre l’érosion pluviale et des élagages inadaptés, la réhabilitation de temples, de niches votives et autres éléments de patrimoines matériels et immatériels avec l’intervention des artistes visant notamment à en révéler les attributs, la réfection, la peinture et l’enduit dans la masse de murs, la fabrication et l’installation de bancs publics et mobiliers urbains sur le site pour le confort des collectivités et des usagers, le traitement de la voirie et des sols adapté aux usages profanes et religieux.
Les travaux d’aménagement des sites sont réalisés chaque année dans le cadre du festival-atelier d’art contemporain « éclosions urbaines » et chaque site réhabilité est inauguré pendant le festival-atelier le 9 janvier, veille de la fête nationale vodùn.
Les travaux sont dirigés par Gérard Bassalé, directeur du Centre Culturel OUADADA, en charge de l’ensemble de la partie opérationnelle du programme et de sa conception technique, artistique ainsi que de sa gestion financière.
A la fin des travaux, les collectivités familiales, les habitants du quartier et les usagers de la place se regroupent au sein d’une association pour gérer et entretenir le site.
Au cours de la réalisation du projet «éclosions urbaines», étape par étape, le Comité scientifique organisera des conférences-débat et un colloque international sur des thèmes en rapport avec la préservation du patrimoine, la création contemporaine, la promotion de l’art, de la culture et du tourisme… L’Ecole du Patrimoine Africain et le Centre Culturel OUADADA pourront accueillir le colloque et les conférences-débat.
Le Comité scientifique émet aussi des avis sur les aménagements réalisés sur le site, rédige des articles et participe à l’élaboration du catalogue du projet, phase par phase. L’association Incite Formation de Cergy-Pontoise sera en charge des supports web-media et de la conception graphique du catalogue dont la vocation est d’être largement diffusé, au Bénin et à l’étranger.
La Direction opérationnelle communique sur l’ensemble des activités sur les réseaux sociaux et dans les médias. Elle réalise des éléments de presse, des interviews et des reportages qui sont diffusés dans les journaux, sur les radios et sur les chaînes de télévisions, pour échanger avec le grand public. Elle est aidée dans sa mission par l’association Incite Formation de Cergy-Pontoise qui organise des ateliers-écoles en cours d’année pour renforcer les capacités des jeunes béninois et français dans les domaines de la production de données multimédias et la réalisation d’œuvres audiovisuelles de communication.
Les rapports des activités sont rédigés au fur et à mesure par la Direction opérationnelle. À la fin de chaque opération, celle-ci rédige un bilan général du projet qu’elle envoie au Comité de pilotage, au Comité scientifique et aux différents partenaires.
Le Festival-atelier d’art contemporain «éclosions urbaines»
Le festival-atelier est une des composantes les plus innovantes du projet «éclosions urbaines». En effet, la phase de réalisation des travaux d’aménagement des différents sites est programmée dans le cadre d’un festival d’art contemporain, nouveau concept de festival-atelier qui se déroulera chaque année aux mois de novembre, décembre et janvier.
Les travaux d’aménagement proprement dits se dérouleront pendant les deux premiers mois du festival, simultanément avec de nombreux événements et interventions artistiques, et chaque nouveau site réhabilité sera inauguré le 9 janvier, veille de la Fête nationale des cultes vodùn, événement phare du calendrier du festival-atelier, en présence des autorités béninoises, des partenaires institutionnels et privés, des communautés et des bénéficiaires.
Le projet «éclosions urbaines» offre ainsi un formidable potentiel de développement touristique pour le Bénin en réhabilitant progressivement le patrimoine historique exceptionnel des places traditionnelles, en donnant une visibilité internationale à l’art contemporain béninois grâce à leurs interventions pérennes sur les places traditionnelles de la Capitale, et en inscrivant un nouvel événement majeur au calendrier des grands rendez-vous culturels internationaux : le festival-atelier d’art contemporain «éclosions urbaines».
Le concept innovant d’ «éclosions urbaines» permet ainsi d’appuyer le développement touristique de Porto-Novo et du Bénin sur deux piliers : le tourisme culturel de découverte d’un patrimoine exceptionnel et méconnu sur l’ensemble de l’année, et le tourisme événementiel international pendant les mois du festival.
Outre les travaux de réhabilitation d’un site historique avec l’intervention d’artistes, le festival-atelier propose des expositions, des performances artistiques, des ateliers de street-art et des spectacles. Une Direction du festival regroupant la Direction opérationnelle et des acteurs culturels et touristiques lance un appel à candidatures à l’attention des artistes pour sélectionner les participants. Les candidats proposent leurs œuvres ou leurs interventions qui sont évaluées puis sélectionnées pour les expositions et les spectacles (théâtre, conte, slam, musique, danse, vidéo-multimédias,…). Les expositions ont lieu notamment sur les places précédemment réhabilitées (par exemple Djissou comè et Djihoué comè), au Jardin des Plantes et de la Nature et au Centre Culturel OUADADA, pendant trois mois. La Direction opérationnelle se charge de la scénographie et de l’accrochage des œuvres. Elle est aidée dans sa mission par l’association des artistes plasticiens de Porto-Novo dénommée Alokplé. Les spectacles ont lieu sur les mêmes sites et seront plus particulièrement concentrés sur les mois de décembre et janvier.